SANTÉ À VOIX HAUTE n°79 - Décembre 2024


Les violences sexistes et sexuelles enfin documentées

Des faits de violences sexistes et sexuelles (VSS) sont souvent dénoncés parmi les professionnels de santé, en particulier pendant les études  médicales. Plusieurs enquêtes viennent simultanément d'être publiées à propos de l'état de santé des professionnels de santé et des étudiants en médecine, ainsi que des VSS qu'ils subissent.

La santé des soignants, et leur santé mentale

  • Chaque année, le baromètre santé Odoxa-MNH, dresse le tableau de la satisfaction au travail, la santé mentale, la violence au travail… parmi les professionnels de santé, et en comparaison avec l’ensemble des actifs.
    La satisfaction au travail des professionnels de santé est nettement inférieure à celle des autres Français en activité (13 points de moins) : 64% vs 77%. Les professionnels de santé connaissent bien plus de situations de stress au travail que les autres actifs et sont beaucoup plus nombreux que les autres actifs à faire face à l’incivilité (45% vs 30%) voire à l’agressivité physique (31% vs 27%) de leurs patients. Au total, 56% des professionnels de santé en France vivent au moins une situation de violence au travail… c’est 18 points de plus que ce que vivent leurs concitoyens dans le cadre de leur travail.
    C’est encore plus préoccupant s’agissant de leur santé mentale : 29% d’entre eux estiment qu’elle est « mauvaise » ou « médiocre » … c’est le double de ce que l’on relève en population générale.

 

  • Les internes et les étudiants en médecine font l’objet d’enquêtes périodiques sur leur santé mentale : 8300 internes et externes ont répondu en 2024 au questionnaire mis en ligne proposés par des  associations d’étudiants. Cette enquête témoigne des situations de stress vécues par des étudiants et internes en médecine ; 52 % ont un niveau d’anxiété élevé, 27 % déclarent avoir vécu des épisodes dépressifs caractérisés, 21 % ont des idées suicidaires, et 66% connaissent le burn-out… indicateurs mesurés à l’aide de grilles scientifiques validées. Par ailleurs, 22 % des étudiants font état de situations de harcèlement sexuel. 

Les violences sexistes et sexuelles (VSS)

  • Un questionnaire a été adressé en début d’année 2024 aux 285 000 médecins par le Conseil national de l’ordre des médecins : 19 000 réponses ont pu être exploitées. Le monde médical apparaît comme un lieu où les violences sexistes et sexuelles sont nombreuses et en majorité dans le parcours étudiant : 29% des médecins actifs ont déjà été victimes, en majorité lors de leur parcours étudiant (54% des médecins femmes). Les faits évoqués sont des outrages sexistes et sexuels (49 %), des situations de harcèlement sexuel (18 %), des agressions sexuelles (9%) et des viols (2%). L’auteur des agressions est dans 26 % des cas un médecin. Les médecins sont convaincus que les victimes ont du mal à se faire reconnaître en tant que victime, seulement 3% des victimes déclarant que l’Ordre a été informé (Conseil national de l’ordre Le Monde).
  • Constat tout à fait préoccupant également de l’ordre des infirmiers qui a mené une enquête similaire (19 000 répondants). Près de la moitié (49%) des infirmiers déclarent avoir déjà été victimes d’au moins un type de VSS au cours de leur carrière – 53% chez les infirmières, et 24% chez les infirmiers : 39% citent des réflexions inappropriées ou dégradantes du fait de leur genre ; 21% des outrages sexistes ; 4% des agressions sexuelles ; 0,13% des viols.

MÉTHODE - Le baromètre des professionnels de santé Odoxa-Mnh, est exploité à partir d'un échantillon représentatif de professionnels de santé.

En revanche, les trois autres enquêtes que nous venons de citer (étudiants/internes, médecins, et infirmiers) sont basées sur des réponses en ligne (sur internet), selon une démarche volontaire. Dans ces conditions, malgré la taille importante des répondants (de 9000 à 20 000 répondants selon les enquêtes) il est possible que les personnes ayant subi des violences physiques ou sexuelles soient surreprésentées parmi les personnes ayant répondu à ces questionnaires en ligne.


François Tuffreau, publié le 14 décembre 2024

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